Dr Marion Barrault-Couchouron
Docteur en psychologie, Institut Bergonié et Inserm, Bordeaux
Dr Benjamin Wyplosz
Institut Gustave Roussy, Villejuif
CHU Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre
Qu’est-ce que la thérapie assistée par psychédéliques ?
La thérapie assistée par psychédéliques consiste à faire une psychothérapie, qui sera augmentée par la prise d’une molécule, un psychédélique. Les psychédéliques sont des agonistes des récepteurs de la sérotonine. Nous en connaissons deux plus particulièrement : le LSD et la psilocybine, qui est contenue dans les “champignons magiques”, les champignons hallucinogènes. Cette thérapie consiste donc à préparer l’administration de cette molécule, avec un psychothérapeute, ensuite à administrer la molécule. Les patients font alors une expérience psychédélique puis, on repart dans une séance d’intégration.
Quelles sont les indications ?
Pour le moment, les indications qui ont été testées dans le cadre d’études concernent des personnes atteintes de cancers notamment qui présentent des traits élevés de souffrance psychique, qu’on appelle la démoralisation ou la détresse existentielle, avec des tableaux d’anxiété très envahissants, et des répercussions très importantes sur leur qualité de vie, et pour lesquelles les résultats sont modérés, en termes d’efficacité, avec les psychothérapies classiques ou des antidépresseurs.
Quels sont les résultats ?
D’abord il faut rappeler que les psychédéliques sont des molécules qui sont classées comme des stupéfiants, on n’y a donc pas accès. Nous parlons ici de recherche clinique, c’est-à-dire de mettre à disposition ces molécules dans un cadre qui est tout à fait bien codifié en France. Les principaux résultats, produits aux États-Unis, principalement en 2016, ont montré que l’administration de ces molécules accompagnées de psychothérapie aux patients atteints de cancer permettait une rémission des symptômes de dépression dans à peu près 70 % des cas, avec un effet rémanent sur 3-4 ans, pour les personnes qui ont pu être suivies pendant plusieurs années. Ce sont des résultats qui sont vraiment très intéressants, très prometteurs, mais sur de petites études, avec peu de patients. Il faut donc reproduire ces études, en particulier en France, pour voir si nous obtenons les mêmes résultats, et si ces molécules et ces psychothérapies assistées par des psychédéliques peuvent être administrées, en routine, dans le soin des malades atteints de cancer.
En pratique, c’est comme le cannabis ?
Alors non, ce n’est pas comme le cannabis, puisque pour le cannabis, il faut en consommer tous les jours pour avoir un allégement de certains symptômes en continu. Là, il s’agit d’une seule prise unique de psilocybine, voire éventuellement deux prises distancées, dans un contexte de psychothérapie qui accompagne la phase préparatoire, l’intégration de l’expérience. Ce sont des modèles de prise en charge très différents. Par aileurs, on comprend bien aussi la plus-value par rapport à la prise d’antidépresseurs, tous les jours, avec les effets secondaires que l’on peut avoir avec ce type de traitement.
Existe-t-il des effets indésirables ?
Non, il n’y a pas d’effets indésirables graves. L’effet de la molécule est vraiment transitoire, et il n’y a pas de dose létale, on ne peut pas se tuer en prenant un psychédélique, c’est impossible.