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Fresenius Replay 2024
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Cours Saint-Paul 2023 – Rétrospectives et perspectives sénologiques

Le 21e cours francophone supérieur sur les cancers du sein et les cancers gynécologiques a largement permis une mise en lumière des avancées marquantes de ces derniers mois dans le cancer du sein, avec un changement certain de nos stratégies thérapeutiques et pratiques établies jusque-là, notamment pour les tumeurs triples négatives, dont l’efficacité du carboplatine et de l’immunothérapie en situation localisée est désormais bien documentée. L’essor des anticorps drogue-conjugués a été également souligné, puisqu’ils confirment leur place prégnante dans l’arsenal thérapeutique du cancer du sein métastatique pour les tumeurs avec amplification de HER2 et triple négatives, mais désormais aussi pour les tumeurs dites HER2-faibles, avec les résultats de l’essai DESTINY-Breast04 et l’efficacité démontrée du trastuzumab déruxtécan (T-DXd). L’émergence de nouvelles classes thérapeutiques illustre à nouveau la place cruciale de l’expertise anatomopathologique, à l’instar des tumeurs HER2-faibles, qui représentent plus de la moitié des cancers du sein, et qui nous amènent à reconsidérer nos stratégies thérapeutiques usuelles, en particulier pour les tumeurs considérées jusque-là comme luminales ou triple négatives. L’heure est à la médecine de précision, avec des bouleversements à la fois nosologiques et thérapeutiques. 

Cet article vise à proposer une synthèse des actualités riches et récentes dans le cancer du sein localisé et métastatique, discutées aux Cours Saint-Paul, afin d’éclairer nos changements de pratique et d’illustrer les progrès considérables accomplis.

 

Actualités dans les cancers du sein luminaux : quelles évolutions thérapeutiques majeures ? 

Cancer du sein précoce 

En situation localisée, les données présentées et discutées ont concerné plusieurs thématiques, allant des modalités et de la durée de l’hormonothérapie adjuvante à la place des inhibiteurs de CDK4/6, ainsi qu’une mise à jour quant aux possibilités de grossesse après cancer du sein. 

La suppression ovarienne

Concernant la question de la suppression ovarienne en situation adjuvante, si l’étude ASTRRA avait déjà objectivé un bénéfice à l’adjonction d’une suppression ovarienne au tamoxifène, pendant 2 ans, chez 1 298 femmes jeunes qui conservaient une activité ovarienne après chimiothérapie, de nouveaux résultats ont été présentés à l’ASCO en 2022, avec quasiment 9 ans de recul, et implémentant des informations utiles en pratique courante (1). Dans cette étude, dont l’objectif primaire était la survie sans récidive,
1 282 patientes de 45 ans et moins, porteuses d’un cancer du sein précoce opéré, et qui ont toutes reçu une chimiothérapie adjuvante, ont été randomisées entre un bras de traitement par tamoxifène seul pendant 5 ans et un bras de traitement qui associait tamoxifène pendant 5 ans et goséréline pendant 2 ans, à la posologie de 3,6 mg tous les 28 jours. 

L’adjonction de la suppression ovarienne est associée à une amélioration significative de la survie sans récidive qui passe de 80,2 à 85,4 % (HR = 0,67 ; IC 95 % = 0,51-0,87 ; p = 0,0027) ; le pourcentage de rechutes métastatiques est de 12,2 % dans le bras tamoxifène seul contre 8,5 % dans le bras de traitement incluant la suppression ovarienne. Il n’est pas objectivé de différence significative en termes de survie globale (HR = 0,78 ; IC 95 % = 0,49-1,25 ; p = 0,3). Il est retrouvé des taux de survie globale à 8 ans de 96,5 % dans le bras de traitement comportant la suppression ovarienne, contre 95,3 % dans le bras de traitement avec tamoxifène seul. Il semble, à travers l’analyse en sous-groupes, que les patientes de 40 à 45 ans bénéficient le plus de la suppression ovarienne (2). 

Cette amélioration de la survie sans récidive chez les patientes pré-ménopausées à haut risque de récidive et qui ont reçu une chimiothérapie vient étayer les données des deux études de phase III
SOFT et TEXT, dans lesquelles, avec un recul médian respectif de 12 et 13 ans, il est retrouvé un bénéfice de l’association anti-aromatase (exémestane) et suppression ovarienne, en comparaison à l’association tamoxifène et suppression ovarienne, en termes de survie sans récidive à distance et de survie globale, bien que les différences ne soient pas statistiquement significatives (3). 

Les inhibiteurs de CDK4/6

L’autre point développé concernant l’hormonothérapie et les patientes à haut risque de récidive est celui de la place des inhibiteurs de CDK4/6 en situation adjuvante. Si les essais PENELOPE-B et PALLAS, qui évaluaient le palbociclib en situation précoce, sont négatifs, les résultats de l’étude MonarchE présentés à San Antonio en 2022 semblent quant à eux plus encourageants (4, 5). Une nouvelle analyse intermédiaire de cette étude de phase III a été présentée pour la 4e fois, à 42 mois de suivi, et publiée début janvier dans la revue The Lancet Oncology (6). Au total, 5 637 patientes à haut risque de récidive ont été randomisées entre un bras de traitement comportant une hormonothérapie versus un bras de traitement associant hormonothérapie et abémaciclib pendant 2 ans. 

Chez les patientes ayant reçu l’abémaciclib, il est objectivé un taux de survie sans récidive infiltrante à 4 ans de 85,8 contre 79,4 % pour les patientes qui ont reçu l’hormonothérapie seule, avec un bénéfice absolu de 6,4 % en faveur du bras avec abémaciclib (HR = 0,664 ; IC 95 % = 0,578-0,762 ; p < 0,0001). En termes de survie sans récidive à distance, il est noté la survenue de 281 événements dans le bras de traitement avec abémaciclib contre 421 pour les patientes qui recevaient l’hormonothérapie seule, soit des taux de survie sans récidive à distance de 88,4 % pour les patientes recevant l’abémaciclib, versus 82,5 % sans abémaciclib (HR = 0,659 ; IC 95 % = 0,567-0,767 ; p < 0,0001) avec un bénéfice absolu de 5,9 % en faveur de la combinaison. Ce bénéfice est croissant avec le temps et se maintient à l’arrêt de l’abémaciclib. 

Concernant les toxicités, il faut souligner un plus grand taux de thromboses dans le bras de traitement avec abémaciclib (2,7 versus 0,7 %) et un taux de pneumopathies interstitielles diffuses de 3,3 %. 

Si les données en termes de survie globale sont encore immatures à ce stade, il semble que l’abémaciclib ouvre une brèche en situation adjuvante, pour les patientes porteuses d’un cancer du sein à haut risque de récidive, dans l’attente des résultats ultérieurs. 

La prolongation de l’hormonothérapie

Concernant la durée de l’hormonothérapie adjuvante, de nouvelles données émanant de l’étude DATA viennent questionner la prolongation systématique de l’hormonothérapie par anti-aromatase après une hormonothérapie séquentielle (7). Cette étude a inclus 1 660 patientes ménopausées, qui ont été randomisées après 2 à 3 ans de tamoxifène pour recevoir 3 ou 6 ans d’anti-aromatase (anastrozole), et avait pour objectif primaire la survie sans récidive ajustée, à l’issue des 3 années d’anti-aromatase. Une stratification a été faite selon le statut des RH, l’envahissement ganglionnaire, l’expression de HER2 et la durée de traitement par tamoxifène. 

Les résultats ont été présentés avec un suivi médian de 10 ans, et il est retrouvé une augmentation de 3 % de la survie sans récidive ajustée lorsque l’anti-aromatase est poursuivie pendant 6 ans en comparaison au groupe 3 ans (69,1 versus 66 % ; HR = 0,86 ; IC 95 % : 0,72-1,01 ; p = 0,073) ; il n’existe pas de bénéfice en survie globale.  Seuls certains sous-groupes bénéficient de la prolongation en termes de survie sans récidive ajustée : les patientes avec une tumeur exprimant à la fois les récepteurs aux œstrogènes et la progestérone (HR = 0,77 ; IC 95 % = 0,63-0,93 ; p = 0,008) et qui ont un envahissement ganglionnaire axillaire (HR = 0,74 ; IC 95 % = 0,59-0,93 ; p = 0,011). 

Conséquemment, la prolongation de l’anti-aromatase plus de 3 ans après 2 à 3 ans de tamoxifène ne doit pas être systématique, mais est à considérer pour les patientes à haut risque de récidive (pN+), et avec une expression conjointe des récepteurs aux œstrogènes et à la progestérone. 

Grossesse et interruption temporaire de l’hormonothérapie

Enfin, les premiers résultats de la cohorte POSITIVE présentés à San Antonio en 2022 nous apportent des éléments rassurants quant à l’interruption de l’hormonothérapie adjuvante pour autoriser une grossesse (8). Il s’agit de la première étude prospective qui s’est intéressée à l’évaluation d’une interruption temporaire de l’hormonothérapie pour un projet de grossesse, avec comme critère de jugement principal la survie sans récidive (à distance, controlatérale et homolatérale). Au total, 516 patientes ayant bénéficié d’une hormonothérapie pour un cancer du sein de stade I à III avec une interruption de l’hormonothérapie adjuvante entre 18 et 30 mois ont été incluses dans cette cohorte internationale. L’hormonothérapie était interrompue pour une durée maximum de 2 ans, avant sa reprise pendant 5 ou 10 ans. Une durée de 3 mois de wash-out du tamoxifène était retenue. Il a été utilisé comme bras contrôle une cohorte de 1 499 patientes issue des essais SOFT et TEXT, après appariement. Parmi la patientes incluses, la majorité (94 %) avait un cancer de stade I ou II, et une minorité (6 %) un cancer de stade III, et 42 % avaient reçu du tamoxifène avant l’interruption, contre 52 % qui avaient reçu l’association inhibiteur de l’aromatase et suppression ovarienne. 

In fine, à l’issue d’un suivi médian de 41 mois, il est retrouvé un taux de récidive de 8,9 % à 36 mois, avec un taux de récidive à distance de 4,5 contre 9,2 et 5,6 % dans la cohorte contrôle. Il est retrouvé un taux comparable à la population générale d’anomalies congénitales (2 %) et 64 % des patientes incluses ont donné naissance à un enfant vivant. 

Si ces premiers résultats sont rassurants quant au fait d’interrompre l’hormonothérapie de manière transitoire chez des patientes prises en charge pour un cancer de stade I-II, il est difficile de conclure pour les patientes qui étaient porteuses d’un cancer du sein de stade III au regard du faible nombre de patientes ; pour les 23 patientes N2 de la cohorte, le taux de récidive était de 18,7 %. Il sera indispensable d’attendre l’actualisation de ces résultats avec un suivi plus long. 

 

Cancer du sein métastatique 

En situation métastatique, de nouveaux résultats viennent élargir les perspectives thérapeutiques pour les cancers du sein exprimant les récepteurs hormonaux (RH+) HER2 négatifs (HER2-).

Le sacituzumab govitécan

Fort des résultats obtenus dans la population triple négative, le sacituzumab govitécan (SG), qui cible notamment la protéine membranaire TROP-2 fortement exprimée dans la majorité des cancers du sein, a été évalué au sein de la population RH+ HER2- lourdement prétraitée ; l’étude TROPiCS-02, essai de phase III a ainsi comparé le SG versus une chimiothérapie au choix du médecin chez 534 patientes, et les patientes avaient déjà été traitées par hormonothérapie et inhibiteurs de CDK4/6, ainsi que par taxanes, et devaient avoir reçu au moins deux lignes de chimiothérapie en phase métastatique. 

L’étude est positive statistiquement sur son objectif principal, la survie sans progression, et a fait l’objet d’une présentation à l’ASCO en 2022. Les données de l’étude ont été actualisées à la fois pour la survie globale, qui était un critère secondaire de l’essai, mais aussi en termes de qualité de vie et présentées à l’ESMO. Concernant la survie globale, le SG est associé à un bénéfice de 3,2 mois, statistiquement significatif (14,4 versus 11,2 mois ; HR = 0,79 ; IC 95 % = 0,65-0,96 ; p = 0,02) (9).

Si la valeur clinique de ce bénéfice interroge, notamment au regard de la tolérance du sacituzumab govitécan, qui est celui d’une chimiothérapie classique, avec principalement neutropénie et diarrhées, cela pourrait constituer une nouvelle option thérapeutique à considérer dans l’attente d’un éventuel remboursement, et la présentation des données complètes de qualité de vie.

Les SERDs

L’autre perspective thérapeutique nouvelle concerne l’hormonothérapie, avec une quinzaine de nouveaux SERDs (dégradeur du récepteur aux estrogènes) actuellement en cours de développement. À la différence du fulvestrant, disponible depuis 20 ans, ces nouvelles molécules s’administrent par voie orale. 

L’élacestrant

L’essai de phase III EMERALD est le premier à avoir rapporté des résultats positifs en faveur d’un SERD oral, l’élacestrant. Dans cette étude, 447 patientes ménopausées, qui avaient déjà reçu une à deux lignes d’hormonothérapie, dont une avec des anti-CDK4/6, ont été randomisées entre l’élacestrant ou une hormonothérapie standard seule (fulvestrant ou inhibiteur de l’aromatase), et il était recherché sur l’ADN tumoral circulant à l’inclusion une mutation ESR1. 

Il existe un bénéfice en survie sans progression en faveur de l’élacestrant avec un hazard ratio de 0,7 (IC 95 % = 0,552-0,880 ; p = 0,0018) avec une médiane de survie sans progression passant de 1,91 à 2,79 mois ; l’efficacité du SERD oral semble plus importante dans le sous-groupe de patientes avec une tumeur porteuse d’une mutation ESR1 (HR = 0,546 ; IC 95 % = 0,387-0,768 ; p = 0,0005) ; si la médiane de survie globale n’est pas atteinte, l’analyse intermédiaire objective une tendance en faveur de l’élacestrant, en particulier dans la population ESR1 muté (10). 

Cette étude confirme l’efficacité d’un SERD oral par rapport au fulvestrant, avec un bon profil de tolérance, et en particulier dans les tumeurs avec mutation ESR1.

L’amcénestrant et le girédestrant

Deux essais de phase II randomisés ont été présentés à l’ESMO 2022 évaluant des SERDs oraux, AMEERA-3 avec l’amcénestrant (11), et l’essai acelERA (12) avec le girédestrant. Pas de bénéfice démontré en termes de survie sans progression pour les deux molécules, avec un profil de tolérance médiocre pour l’amcénestrant (toxicité digestive, asthénie), et un arrêt de développement de cette molécule. Il est à noter que dans ces deux études, environ 40 % des patientes étaient porteuses d’une mutation ESR1. 

Le camizestrant

À noter, plus récemment, cependant des résultats prometteurs pour le camizestrant (AZD9833), présentés à San Antonio en novembre, avec un bénéfice en survie sans progression, dans l’étude SERENA-2, essai randomisé multicentrique de phase II, et des études de phase III en cours avec cette même molécule (13). Pour rappel, il est possible à l’heure actuelle d’inclure nos patientes en bonne réponse thérapeutique, en situation de première ligne à l’issue de 6 mois de traitement par anti-aromatase et inhibiteur de CDK4/6 dans l’essai SERENA-6, étude de phase III randomisée, en double aveugle, qui permet de monitorer l’apparition d’une mutation ESR1, et en cas d’apparition de cette mutation, sans progression clinique, d’administrer un SERD oral de nouvelle génération (AZD9833) utilisé dans l’étude SERENA-2 (14). 

Les inhibiteurs d’AKT

Concernant les inhibiteurs d’AKT, si leur difficulté en pratique clinique réside principalement dans leurs nombreux effets secondaires, avec notamment des rashs cutanés, des diarrhées et l’hyperglycémie, qui souvent conduisent à l’arrêt du traitement, il a été présenté à San Antonio en 2022 les résultats positifs de l’essai de phase III CAPItello-291 qui comparait capivasertib plus fulvestrant contre fulvestrant plus placebo ; il s’agit d’un des premiers essais randomisés ayant inclus des patientes pré-traitées par inhibiteurs de CDK4/6 et les patientes progressaient après un inhibiteur de l’aromatase. 

L’adjonction du capivasertib au fulvestrant double la survie sans progression, qu’il y ait ou non une altération de la voie AKT. Les effets secondaires de grade 3 à type de rashs cutanés, diarrhées et hyperglycémie ont conduit à l’arrêt du traitement chez 13 % des patientes (15). 

Ces résultats viennent conforter les résultats de l’essai de phase II FAKTION, pour laquelle l’association du capivasertib (inhibiteur d’AKT) au fulvestrant améliorait la survie sans progression et la survie globale, chez des patientes hormono-résistantes (16). 

L’association abémaciclib + anti-aromatases

Enfin, concernant l’actualisation des données de survie globale des patientes porteuses d’un cancer du sein métastatique RH+ HER2- et traitées par l’association abémaciclib et anti-aromatases en première ligne, une seconde analyse intermédiaire de l’étude MONARCH 3 présentée à l’ESMO en 2022 a objectivé une médiane de survie globale de 67,1 mois dans le groupe abémaciclib et hormonothérapie versus 54,5 mois dans le groupe hormonothérapie seule (HR= 0,754 ; IC 95 % = 0,584-0,974 ; p = 0,0301). Le suivi médian était de 70,2 mois. Il a été également présenté des données de survie globale dans la population de patientes qui présentaient une maladie métastatique viscérale, avec une médiane de survie globale de 65,1 mois pour l’association abémaciclib et hormonothérapie contre 48,8 mois pour le groupe hormonothérapie seule (HR = 0,708 ; IC 95 % = 0,508-0,985). Cependant, malgré un bénéfice de plus de 12 mois dans le groupe de patientes avec abémaciclib, ces résultats ne sont pas statistiquement significatifs et les données finales sont attendues pour 2023 (17).  

 

Actualités dans les cancers du sein triple négatifs : quels nouveaux algorithmes ?

En situation localisée 

Au chapitre des cancers du sein triple négatifs localisés, une large session des cours Saint-Paul a permis de reposer les standards de traitement actuel et de souligner les questions en suspens.

Les standards

Le carboplatine

Toutes les études récentes (GeparSixto et BrighTNess) (18, 19) convergent vers la place centrale du carboplatine comme chimiothérapie néoadjuvante privilégiée pour les tumeurs triple négatives localisées. 

Le pembrolizumab 

L’arrivée du pembrolizumab avec les résultats de l’essai pivotal KEYNOTE-522 a complété ce schéma thérapeutique néoadjuvant pour les stades II-III, définissant un nouveau standard de traitement (20). 

La chirurgie

Pour les tumeurs de stade I, il est jusque-là toujours recommandé une chirurgie de première intention suivie d’une chimiothérapie standard adjuvante constituée d’anthracyclines et de taxanes, à partir des stades pT1b et pT1c. À partir des stades II et III, un traitement systémique premier est quant à lui recommandé, avec une polychimiothérapie comprenant du carboplatine et de l’immunothérapie par pembrolizumab, permettant à l’issue, après chirurgie, d’adapter le traitement systémique, en fonction de la réponse histologique. 

Le traitement post-chirurgie

Beaucoup de questions se posent encore quant au traitement post-chirurgie, notamment celle de l’intérêt de poursuivre le pembrolizumab pour les patientes en réponse histologique complète, et, a contrario, pour les patientes qui ne sont pas en réponse histologique complète, se pose la question de la poursuite du pembrolizumab, et de l’implémentation d’autres traitements qui ont montré un intérêt, en combinaison avec le pembrolizumab (capécitabine et olaparib pour les patientes mutées BRCA). Des essais sont actuellement en cours pour tenter de répondre à ces questions. 

Le carboplatine en néoadjuvant

Dans ce contexte, une autre étude de phase III présentée à San Antonio en 2022 a posé à nouveau la question de l’intérêt du carboplatine en situation néoadjuvante (21). Au total, 720 patientes entre 2010 et 2020, essentiellement pré-ménopausées (58 %) avec des tumeurs considérées comme localement avancées (60 %) et des atteintes ganglionnaires (89 %) ont été incluses. Les patientes étaient randomisées entre un traitement avec paclitaxel (100 mg/m² pour huit cycles) avec ou sans carboplatine (AUC2, pour huit cycles), puis recevaient quatre cycles d’AC (adriamycine/cyclophosphamide) ou d’EC (épirubicine/cyclophosphamide) toutes les 3 semaines. Le suivi médian des patientes a été de 67,6 mois. Le critère de jugement principal était la survie sans événement (SSE). 

Il a été objectivé une SSE à 5 ans de 70,7 % (IC 95 % = 65,8-75,6) dans le groupe avec carboplatine contre 64,1 % (IC 95 % = 59,0-69,2) dans le groupe contrôle avec un HR à 0,80 (IC 95 % = 0,62-1,03 ; p = 0,081). Concernant la survie globale à 5 ans, celle-ci est retrouvée à 74,4 % (IC 95 % = 69,7-79,1) dans le groupe avec carboplatine contre 66,8 % (IC 95 % = 61,7-71,9) dans le groupe contrôle, avec un HR à 0,74 (IC 95 % = 0,56-0,97 ; p = 0,029). Si cette étude est négative sur son critère de jugement principal, il existe un bénéfice à adjoindre du carboplatine au regard des résultats de survie globale, mais également en termes de réponse histologique complète (pCR). En effet, chez les patientes de moins de 50 ans où ce bénéfice est surtout marqué, il est retrouvé un taux de pCR qui passe de 41,5 à 61 %, une SSE à 5 ans qui passe de 61,7 à 74,2 % (HR = 0,64 ; IC 95 % = 0,47-0,87 ; p = 0,004), et une survie globale à 5 ans qui passe de 65,9 à 77,1 % (HR = 0,61 ; IC 95 % = 0,44-0,85 ; p = 0,003). 

Cet essai confirme donc à nouveau l’intérêt du carboplatine en situation néoadjuvante dans le cancer du sein triple négatif précoce.

Le pembrolizumab

Concernant l’étude KEYNOTE-522, si les données de survie globale ne sont pas encore matures, les derniers résultats présentés en début d’année ont montré une survie sans événement à 3 ans significativement augmentée passant de 76,8 à 84,5 %, avec une diminution du risque d’événement (progression, récidive locale ou à distance et second cancer) de 37 % avec un HR à 0,63 (IC 95 % = 0,48-0,82), et ce quel que soit le statut PD-L1 de la tumeur. Concernant les toxicités, un arrêt du traitement lié aux effets indésirables était retrouvé chez 27,7 % des patients du groupe pembrolizumab contre 14,1 % dans le groupe placebo (20). 

Si l’analyse HRQoL (health-related quality of life) de l’étude n’a pas retrouvé d’effet significatif de l’adjonction du pembrolizumab sur la qualité de vie, à travers l’analyse des PRO (patient-reported outcomes) il sera nécessaire de disposer d’une analyse à plus long terme des toxicités aiguës et chroniques liées à l’immunothérapie. 

Le sacituzumab govitécan

En termes de perspectives thérapeutiques nouvelles, il faut mentionner la présentation à l’ASCO 2022 des premiers résultats de l’étude NeoSTAR avec l’évaluation du SG en situation précoce. Dans cet essai, les patientes étaient porteuses d’une tumeur du sein triple négative supérieure à 1 cm ou avec envahissement ganglionnaire (tumeurs T1c et T2) et recevaient quatre cycles de SG. À l’issue de ces quatre cycles, une évaluation radiologique était pratiquée, et en l’absence de bonne réponse, une biopsie tumorale était effectuée, ainsi que l’adjonction d’une chimiothérapie avant chirurgie. Le critère de jugement principal était le taux de réponse histologique complète (pCR). Au total 50 patientes ont été incluses, et 11 avaient une tumeur de stade I. 

15 réponses complètes sur 29 patientes ont été objectivées, soit un taux de pCR de 52 %, chez les patientes qui avaient reçu le SG seul ; dans la population globale qui incluait les patientes qui avaient reçu une autre chimiothérapie, le taux de pCR était de 30 % (IC 95 % : 18-45) ; à noter un taux de pCR de 86 % parmi les huit patientes qui étaient porteuses d’une mutation constitutionnelle de BRCA (22). 

Si ces données restent encore préliminaires, il s’agit de la première étude rapportée en phase précoce avec le SG qui valide l’intérêt de poursuivre cette évaluation princeps, avec notamment la détermination de la durée du traitement, la possibilité d’une association avec un inhibiteur de checkpoint et/ou inhibiteur de PARP, et l’identification de biomarqueurs, ouvrant des perspectives thérapeutiques nouvelles pour le traitement des cancers triple négatifs au stade précoce. 

 

En situation métastatique 

Si jusque-là les cancers du sein métastatiques triple négatifs étaient les parents pauvres dans le développement de nouvelles armes thérapeutiques, il faut souligner les récentes avancées majeures telles que l’immunothérapie avec le pembrolizumab, mais aussi les anticorps conjugués.

Le sacituzumab govitécan

En effet, les anticorps drogue-conjugués font désormais partie de l’arsenal thérapeutique, avec notamment le SG disponible en accès précoce après deux lignes de traitement par chimiothérapie selon les données de l’essai de phase III ASCENT. Sur le plan structurel, le SG est un anticorps humanisé anti-TROP2 couplé au SN-38, un métabolite actif de l’irinotécan, et un linker hydrolysable assure la liaison des deux, permettant une libération du métabolite actif uniquement dans les cellules tumorales. L’étude a évalué le SG chez 468 patientes qui présentaient un cancer du sein triple négatif localement avancé ou métastatique et qui progressaient après deux lignes de chimiothérapie ; les patientes ont été randomisées entre le bras SG et le bras chimiothérapie au choix de l’investigateur. 

Un bénéfice en survie sans progression dans le bras SG (5,6 versus 1,7 mois ; HR = 0,41 ; IC 95 % : 0,32-0,52 ; p < 0,001) a été objectivé, ainsi qu’en survie globale (12,1 versus 6,7 mois ; HR = 0,48 ; IC 95 % = 0,38-0,59 ; p < 0,001). Ces résultats étaient observés dans tous les sous-groupes, y compris chez les patientes plus lourdement prétraitées. 

Concernant les effets secondaires, il s’agissait essentiellement de neutropénies (51 % dans le bras SG versus 33 %), et de diarrhées (10 % dans le bras SG versus 1 %) (23). 

Le pembrolizumab

Concernant la place de l’immunothérapie, celle-ci est également bien définie depuis les résultats de l’étude KEYNOTE-355, qui a montré un bénéfice net en survie sans progression et en survie globale avec l’adjonction du pembrolizumab à la chimiothérapie en situation de première ligne, pour les patientes identifiées par un seuil de score CPS à 10. Dans cet essai de phase III, 847 patientes ont été randomisées entre le bras de traitement pembrolizumab + chimiothérapie versus le bras de traitement par chimiothérapie seule, avec une stratification selon le statut PDL1 et le score CPS. 

Pour les patientes avec un score CPS supérieur ou égal à 10, un gain en survie sans progression (9,7 contre 5,6 mois dans le bras chimiothérapie seule ; HR = 0,65 ; IC 95 % = 0,49-0,46 ; p = 0,0012) a été observé ; le bénéfice est également retrouvé en survie globale (HR = 0,73 ; IC 95 % = 0,55-0,95) ; pas de bénéfice significatif retrouvé pour les patientes avec un score CPS inférieur à 10 (24). 

Le pembrolizumab est désormais disponible en accès précoce à la dose de 200 mg tous les 21 jours en combinaison à une chimiothérapie par carboplatine et gemcitabine et/ou paclitaxel pour les patientes avec un statut PD-L1 positif et un score CPS supérieur ou égal à 10 en situation de première ligne métastatique. Pour ces patientes, il est primordial de privilégier dès que cela est possible une inclusion dans un essai thérapeutique, pour permettre notamment l’accès à de nouvelles drogues en cours d’évaluation au sein d’essais de phase III. 

Les essais en cours

On notera l’intérêt de l’essai ASCENT 04 en situation de première ligne, en cas de statut PD-L1 positif, qui compare l’association SG et pembrolizumab versus chimiothérapie standard et pembrolizumab (25) et l’essai TROPION-Breast02, permettant un accès éventuel au datopotamab déruxtécan (dato-Dxd) en comparaison à la chimiothérapie standard chez les patientes qui ne sont pas éligibles à un traitement par inhibiteur de PD-1/PD-L1 en première ligne du cancer du sein triple négatif localement récurrent, inopérable ou métastatique (26). En effet, cet anticorps conjugué anti-TROP-2 associé au déruxtécan a déjà montré un signal d’efficacité et de tolérance prometteur dans l’essai TROPION (27). Il est enfin également pertinent d’avoir accès à une analyse génomique afin de proposer dès que cela est possible une thérapie ciblée, également dans le cadre d’essais, à l’instar de l’essai SAFIR02 qui a montré un bénéfice en survie après recherche des analyses génomiques, et accès à une thérapie ciblée (28).

 

Actualités dans les cancers du sein HER2-positifs : quels nouveaux paradigmes en 2023 ? 

Le basculement nosologique 

Les tumeurs HER2-faibles

Si en situation localisée, il n’existe pas de nouveauté marquante pour le cancer du sein HER2-positif, le changement tient à l’évolution conceptuelle du statut HER2, et une fragmentation du cadre nosologique usuel, avec l’émergence des tumeurs dites HER2-faibles, nous conduisant à reconsidérer l’ensemble de nos stratégies thérapeutiques, pour les tumeurs considérées jusque-là comme luminales ou triples négatives. Cette nouvelle approche nosologique a largement été discutée cette année aux Cours Saint-Paul, avec comme impératif la nécessité de disposer d’un scoring HER2 pour tous les cancers du sein, au regard de la révolution que constituent les anticorps drogues conjugués et notamment le trastuzumab déruxtécan (T-DXd) dans cette population HER2-faible, qui représente quasiment 45 % des cancers du sein. Le raisonnement en statut HER2 positif ou négatif, avec amplification ou non de HER2, est désormais obsolète. L’expression de cette protéine est en réalité continue, et passait jusque-là sous les radars, car sans effet thérapeutique, puisque les thérapies anti-HER2 étaient réservées aux cancers du sein dits HER2-positifs. L’hétérogénéité du niveau d’expression de HER2 par les cellules tumorales et le développement d’anticorps conjugués ont permis de bousculer cette classification dichotomique des cancers du sein HER2-positif et HER2-négatif, avec une efficacité démontrée des nouvelles drogues cytotoxiques conjuguées à des anticorps anti-HER2 chez les patientes porteuses d’un cancer du sein avec faible expression de HER2, où HER2 est un vecteur permettant d’adresser la chimiothérapie au sein des cellules tumorales. Ces anticorps conjugués ont un mécanisme d’action novateur avec à la fois un effet sur la cellule cancéreuse, mais aussi sur le micro-environnement via un effet bystander. Ces tumeurs HER2-faibles sont fréquentes puisqu’elles représentent, on l’a dit, plus de la moitié des cancers du sein, d’où la nécessité de mieux les identifier au regard des perspectives thérapeutiques nouvelles pour les patientes. 

Ainsi, la classification anatomo-pathologique évolue vers la détermination :

• des tumeurs HER2-négatives (score 0), 

• des tumeurs HER2-positives (score 3+ et 2+ amplifiés) 

• et des tumeurs HER2-faibles (score 1+ et 2+ non amplifiés) 

selon les dernières recommandations établies par le groupe d’étude des facteurs pronostiques par immunohistochimie dans les cancers du sein (GEFPICS) (29). Il faut en outre insister sur le statut versatile du statut HER2-faible et son évolutivité entre tumeur primitive et métastase, avec un taux de discordance évalué à 39 %, plaidant conséquemment pour une évaluation la plus récente possible du statut HER2 et une nouvelle biopsie des lésions métastatiques (30). 

Le trastuzumab déruxtécan

L’étude de phase III randomisée et multicentrique (DESTINY-Breast04) a ainsi évalué l’efficacité du T-DXd par rapport à une chimiothérapie standard chez les patientes porteuses d’un cancer du sein métastatique HER2-faible, en progression après hormonothérapie et/ou une ou deux lignes de chimiothérapies. Parmi les 557 patientes incluses, 494 patientes étaient porteuses d’une tumeur RH+ (88,7 %). 

Dans cette cohorte RH+, il existe une survie sans progression nettement supérieure pour le bras de traitement avec T-DXd (10,1 contre 5,4 mois pour le bras chimiothérapie ; HR = 0,51 ; IC 95 % = 0,40-0,64 ; p < 0,001) ainsi qu’un bénéfice en survie globale (23,9 contre 17,5 mois respectivement ; HR = 0,64 ; IC 95 % = 0,48-0,86 ; p = 0,0028). Le bénéfice est le même dans la population globale de l’étude, et notamment dans la population triple négative avec un HR à 0,48 pour la survie globale qui passe de 8,3 à 18,2 mois (31). 

Au regard de ces résultats, le T-DXd est actuellement disponible en accès précoce pour les patientes atteintes d’un cancer du sein HER2-faible métastatique qui ont reçu au moins une ligne de chimiothérapie au stade métastatique ou qui ont développé une récidive de la maladie pendant ou dans les 6 mois suivant la fin d’une chimiothérapie adjuvante. 

 

En situation métastatique

Le trastuzumab déruxtécan

Au-delà de cet affinement de stratification du statut HER2, l’étayage de l’arsenal thérapeutique pour les cancers du sein métastatiques qui surexpriment HER2 s’est poursuivi, avec notamment les résultats de l’étude DESTINY-Breast03 et l’efficacité démontrée du T-DXd comparé au T-DM1 en situation de deuxième ligne après un traitement antérieur par taxanes et trastuzumab, avec une réduction du risque de progression de plus de 70 % et une survie sans progression médiane non atteinte versus 6,8 mois. Environ 60 % des patientes étaient pré-exposées au pertuzumab. 

Si les données ne sont pas encore matures en termes de survie globale, il existe une différence en survie globale à 1 an en faveur du bras T-DXd (94,1 versus 85,9 % ; HR = 0,56 ; IC 95 % = 0,36-0,86). 

Concernant la toxicité, qui était le point questionnant, quant au risque notamment de survenue de pneumopathie interstitielle, il est retrouvé majoritairement des pneumopathies de faible grade avec un taux de 10,5 %, sans pneumopathie de grade 4 ou 5. 

Des données complémentaires ont été présentées à San Antonio, en particulier concernant le sous-groupe de patientes porteuses de métastases cérébrales contrôlées, où il est retrouvé un maintien de l’amplitude du bénéfice en termes de survie sans progression, avec une survie sans progression de 15 mois dans le groupe de patientes traitées par T-DXd, versus 5,7 mois dans le groupe de patientes traitées par T-DM1. À noter également un taux de réponse complète de 28 %, et un taux de réponse partielle de 36 % pour ces patientes en particulier (32). 

Ces résultats sans précédent en faveur du T-DXd, et notamment pour les patientes avec une atteinte cérébrale, ont plaidé pour un changement de pratique à court terme pour en faire un standard de deuxième ligne et le traitement est actuellement disponible en France en situation de deuxième ligne, en accès précoce. 

Le tucatinib

Concernant le tropisme cérébral des cancers du sein HER2-positifs, il est notable de souligner à nouveau la singularité de l’étude HER2CLIMB qui a permis l’inclusion de patientes porteuses de lésions cérébrales actives, en faisant la seule grande étude randomisée avec métastases cérébrales actives. En effet, environ 50 % des patientes développeront des métastases cérébrales au cours de l’évolution du cancer HER2-positif, avec une morbidité plus importante que les autres localisations métastatiques ; cependant, il est à considérer que ces localisations cérébrales sont similaires au reste de la maladie systémique en termes de sensibilité au traitement et de pharmacocinétique. C’est dans ce contexte que s’inscrit l’étude HER2CLIMB, qui a évalué le tucatinib, un inhibiteur très sélectif pour HER2 chez 612 patientes, préalablement traitées par trastuzumab, pertuzumab et T-DM1, en combinaison à l’association capécitabine plus trastuzumab. 

L’adjonction du tucatinib à l’association capécitabine plus trastuzumab est associée à une augmentation significative de la survie sans progression (7,8 contre 5,6 mois ; HR = 0,54 ; IC 95 % = 0,42-0,71 ; p < 0,001), mais également de la survie globale (21,9 mois contre 17,4 mois, HR = 0,66 ; IC 95 % = 0,5-0,88 ; p < 0,005). Ces bénéfices ont également été objectivés dans le groupe des patientes porteuses de métastases cérébrales, que celles-ci soient jugées actives ou qu’elles aient été antérieurement prétraitées. Dans la population des patientes avec des métastases cérébrales actives, le taux de réponse objective est de 47 % (IC 95 % = 33,7-61,2 ; p = 0,03), avec une survie sans progression à 12 mois de 35 % (contre 0 % dans le groupe des patientes sous placebo, HR = 0,36). Chez les 30 patientes qui présentaient une progression cérébrale isolée et qui ont poursuivi, après un traitement local, le tucatinib dans le cadre de l’essai, le risque de seconde progression ou de décès a été réduit de 67 % (HR = 0,29 ; IC 95 % = 0,11-0,77). 

Sur le plan de la tolérance, il faut souligner essentiellement des effets secondaires de grade 1 à 2 incluant l’asthénie, des troubles digestifs, des syndromes palmo-plantaires et une élévation des transaminases (33). 

Ainsi, le tucatinib vient compléter l’arsenal thérapeutique anti-HER2 et est devenu un nouveau standard en troisième ligne, que les patientes présentent ou non des métastases cérébrales, ou un standard de deuxième ligne en cas de métastases cérébrales. Enfin, il est à noter que la stratégie thérapeutique globale retenue en cas de progression cérébrale isolée reste la poursuite du traitement systémique entrepris, avec l’implémentation en parallèle d’un traitement focalisé au niveau cérébral avec radiothérapie ou chirurgie, à discuter de manière systématique.  

 

Conclusion

In fine, au regard de l’ensemble des progrès thérapeutiques exhaustivement présentés durant ce congrès, de nombreuses données permettent de faire évoluer nos pratiques dans la prise en charge de nos patientes porteuses d’un cancer du sein. L’algorithme décisionnel dans le cancer du sein HER2-positif s’est modifié substantiellement, avec une velléité certaine d’implémenter ces nouvelles drogues en situation adjuvante de manière précoce à l’instar de l’étude DESTINY-Breast05. Concernant le cancer du sein luminal à haut risque de récidive, plusieurs éclaircissements sont apportés quant aux modalités de l’hormonothérapie. Il faut également souligner les nombreuses discussions quant à l’élargissement de la technique du ganglion sentinelle, et le recours à la radiothérapie hypofractionnée à privilégier dès que cela est possible, ainsi que l’impérieuse nécessité de disposer d’un scoring HER2, le statut positif ou négatif ne suffisant plus à la lumière des avancées thérapeutiques majeures présentées ici. Enfin, de l’espoir pour les cancers du sein triple négatifs avec l’implémentation de nouvelles drogues à la fois en situation localisée, comme en situation métastatique associée à des bénéfices en survie.

L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.

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