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Fresenius Replay 2024
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Comment améliorer l’accompagnement social, scolaire et professionnel des AJA atteints de cancer ?

Dr Leïla Gofti-Laroche
Praticien clinicien et chercheur épidémiologie, CHU de Grenoble
Secrétaire de GO-AJA (Groupe onco-hématologie adolescents et jeunes adultes)

 

La réactualisation du référentiel national sur insertion et AJA* a pour objectif d’améliorer l’accompagnement social, scolaire et professionnel des adolescents et jeunes adultes atteints de cancer, c’est-à-dire une tranche d’âge qui est comprise entre 15 et 25 ans, en tout cas en France.

*AJA = adolescents et jeunes adultes

 

Une tranche d’âge très spécifique

L’un des enjeux du référentiel est qu’en termes de prise en charge, par rapport aux enfants et aux adultes atteints de cancer, cette tranche d’âge est très spécifique. Le législateur l’a reconnu depuis le second plan cancer et c’est reconnu encore dans la dernière stratégie décennale de lutte contre les cancers 2021 2030. Il s’agit d’une population qui mérite un accompagnement dédié et spécifique, avec beaucoup d’adaptations. Cela reste des pathologies très rares : un peu moins de 2 500 nouveaux cas de cancer par an. Mais les priorités de santé publique sont soit liées au nombre, au quantitatif, soit au qualitatif. Et c’est vrai que quand on a un cancer dans cette tranche d’âge, un peu comme en pédiatrie d’ailleurs, les enjeux sur le long terme sont très spécifiques afin que ces jeunes, pour lesquels on a tout fait pour les guérir, ne subissent pas une double peine. En effet, on peut guérir d’un cancer, mais ne pas guérir des séquelles et des conséquences psychologiques, sociales…

C’est donc l’enjeu de ce référentiel, en complémentarité de tout un ensemble de choses que nous faisons dans les équipes AJA. Maintenant, il y a une équipe AJA par région française, ce qui est un énorme progrès.

 

Un référentiel dédié

Il s’agit du second référentiel. Le premier datait de 2014, mais avait été fait dans un contexte très différent, et nous l’avons donc complètement refondu avec des thématiques encore plus pratiques. Nous sommes passés un peu vite sur la théorie parce que finalement il y a beaucoup de choses qui sont déjà bien connues. Nous avons décliné les différentes thématiques : en termes d’accompagnement social, comment on fait ? Comment repérer les patients à risque ? Comment bien les évaluer ? Comment bien répondre aux besoins : à court terme, à moyen terme, mais aussi à très long terme ?…

 

Ne pas pénaliser le devenir du patient

Par exemple, typiquement, un aspect qu’on ne voit pas dans les situations adultes, c’est le fait que la maladie vient faire une effraction dans le projet scolaire. Or, si vous loupez votre scolarité à des moments un peu critiques, cela aura des conséquences handicapantes sur tout votre parcours scolaire, votre parcours de formation, votre vie professionnelle et donc cela va avoir un impact énorme sur votre vie.

Par ailleurs, ces pathologies sont marquées par des maladies très spécifiques : on a plus d’hémopathies malignes, c’est-à-dire des leucémies, des lymphomes, on a beaucoup de tumeurs cérébrales, des ostéosarcomes avec parfois des amputations. Ces pathologies impliquent une prise en charge thérapeutique assez lourde : des radiothérapies et/ou des chimiothérapies qui peuvent induire une neurotoxicité, des gestes chirurgicaux qui peuvent être invasifs.

Il s’agit donc de ne pas rajouter aux complications médicales, qu’on essaye vraiment d’éviter, cette pénalité qui est d’handicaper la vie sociale, scolaire, professionnelle, donc finalement la trajectoire, le devenir du jeune patient. On dit souvent que la maladie vient transformer la personne, peut-être un peu moins chez les enfants, qui sont très résilients, plus dans l’instant présent, en revanche, le cancer, chez un adolescent, un jeune adulte, va vraiment avoir des conséquences sur ce qu’il va devenir. Notre rôle est, qu’effectivement, que ce soit sur le plan médical, sur le plan social, sur le plan psychologique, sur le plan de tous les soins de support, de proposer des accompagnements complémentaires qui vont venir atténuer les conséquences. C’est d’ailleurs pour cela que cette session était très importante ainsi que notre collaboration avec l’AFSOS.

 

Le suivi neuropsychologique

Par exemple, nous avons fait un focus cette année sur les bilans et le suivi neuropsychologique. En effet, c’est vraiment un âge de la vie où “câblage neuronal” se met en place, toutes les fonctions exécutives, tout le cognitif sont en train de maturer. Avec la maladie et les traitements, on va souvent venir dégrader les bilans cognitifs. Il y a d’ailleurs quelque chose de très surprenant : le jeune patient atteint de cancer sous-estime énormément la diminution de ses capacités cognitives, alors qu’il y a presque 40 % de nos patients qui ont des troubles cognitifs qui ne sont pas repérés. S’ils retournent en classe avec des difficultés de mémorisation, des difficultés d’attention, etc. malheureusement, quand on n’est pas formé à ça, on va penser qu’ils sont un peu plus bêtes, qui ne sont pas en capacité de continuer des études alors que, si on a un bon accompagnement neuropsychologique, on va s’appuyer sur ce qui fonctionne, sur toutes les capacités qui demeurent pour faire des adaptations, des aménagements et on va leur permettre de continuer leur scolarité et leur éviter cette double peine.

 

Quand le référentiel sera-t-il disponible ?

Il a été validé au niveau national. Nous avons encore quelques retouches à faire, mais je pense que d’ici la fin de l’année il sera disponible en ligne sur le site de l’AFSOS.

 

En savoir plus : go-aja.fr