L’essentiel en un clin d’œil
• Les ePRO permettraient de réduire le taux de passage aux urgences et le taux d’hospitalisation, mais ne modifieraient pas la perception qu’ont les patients de la compréhension de leurs symptômes. Ces outils doivent être conçus avec le concours des populations concernées pour éviter d’élargir la fracture numérique.
• Deux études ont mis en avant l’intérêt de l’acupuncture dans le traitement des toxicités des traitements du cancer : bouffées vasomotrices induites par l’hormonothérapie et xérostomies radioinduites.
• Deux méthodes pour prévenir les toxicités radioinduites ont été décrites : la décolonisation bactérienne dans la prévention de la radiodermite aiguë et l’avasopasem manganèse dans la prévention de la mucite orale sévère.
• Trois résumés ont attiré notre attention dans le domaine vaste de qualité de vie et fatigue. Le plus surprenant reste les résultats obtenus avec un placebo donné en ouvert, c’est-à-dire que le patient est bien au fait qu’il prend un placebo.
• Deux communications se sont intéressées aux inhibiteurs de point de contrôle : les toxicités cardiaques majeures induites et l’effet de la détresse psychologique sur leur efficacité.
TOP 1 / Comme un P.R.O.
Les symptômes signalés à distance par les patients (Patient Related Outcome (ePRO)) font partie de la pratique quotidienne de nombreux centres de cancérologie. Trois abstracts de l’édition 2022 de l’ASCO ont retenu notre attention. Les ePRO permettraient de réduire le taux de passage aux urgences et le taux d’hospitalisation (#1508), mais ne modifieraient pas la perception qu’ont les patients de la compréhension de leurs symptômes (#1506). Ces outils doivent être conçus avec le concours des populations concernées pour éviter d’élargir la fracture numérique (#1507).
ePRO permet la réduction du taux de passage aux urgences et du taux d’hospitalisation
Les auteurs ont examiné l’effet d’un outil de ePRO sur le taux de passage aux urgences et sur le taux d’hospitalisation dans une population de patients atteints de cancer (étude en vie réelle).
Méthode
À partir de juin 2020, il a été proposé aux patients du Highlands Oncology Group (HOG) un système ePRO qui permet la surveillance à distance des symptômes pendant les traitements du cancer. Le dossier médical a été utilisé afin d’obtenir des données sur les patients, les visites, les hospitalisations et les passages aux urgences.
Résultats
Au total, il a été proposé à 855 pa-
tients le système ePRO. Parallèlement, 1 773 patients du même centre n’avaient pas eu la proposition de ePRO et ont été considérés comme groupe témoin. Le groupe ePRO était plus jeune (63,3 versus 66,7 ans) et plus souvent féminin (47,3 versus 39,3 %). Les groupes étaient comparables dans la distribution des sites de cancer. La proportion de patients avec une maladie métastatique était comparable (ePRO 52,9 versus non-ePRO 51,6 %).
Les taux d’utilisation des ressources de santé étaient plus faibles pour les patients de la cohorte ePRO :
• visites aux urgences : 1,72 versus 2,34 pour 100 patients-mois (p = 0,005) ;
• hospitalisations : 4,76 versus 5,41 pour 100 patients-mois (p = 0,04) (Fig. 1).
Figure 1 – Taux de passage aux urgences et taux d’hospitalisation en fonction des groupes.
À retenir
Ces résultats confirment les avantages de l’utilisation d’un outil ePRO pour la réduction de l’utilisation des ressources de soins de santé et élargissent les résultats initiaux des publications précédentes dans le cadre des essais cliniques universitaires aux données de vie réelle. Ces données d’observation sont cependant sujettes à des facteurs de confusion.
• Kolodziej MA, Kwiatkowsky L, Parrinello C et al. ePRO-based digital symptom monitoring in a community oncology practice to reduce emergency room and inpatient utilization. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 1508.
Mise en œuvre massive de solutions de santé numériques
Les auteurs se sont intéressés aux solutions numériques de santé (SNS) qui fournissent aux patients des moyens améliorés pour accéder aux soins. Ils ont étudié la “fracture numérique” potentielle que peut engendrer ce type d’outils. Il s’agissait d’une étude américaine.
Méthode
Une évaluation rétrospective de patients atteints de cancer qui utilisaient une SNS entre le 1er mars 2019 et le 15 janvier 2022 a été réalisée. Quatre outils ont été étudiés :
• une plateforme de gestion des soins (PGS) ;
• un programme de surveillance à distance électronique (ePRO) ;
• un portail patient (PP) ;
• une solution d’éducation numérique (EN).
Résultats
Cette analyse a inclus un total de 267 375 patients. Parmi eux : 172 840 (73,6 %), 9 938 (67,7 %), 49 771 (79,2 %) et 12 044 (56,9 %) patients utilisaient respectivement une PGS, un programme de ePRO, un PP et une solution d’EN. La majorité (> 50 %) des patients était des femmes, de langue anglaise et âgés de 61 à 80 ans.
Après ajustement, il a été observé que les femmes de langue anglaise (PGS : OR = 1,2 ; ePRO : OR = 1,67 ; PP : OR= 1,8 ; EN : OR = 1,89) utilisaient plus souvent de façon significative (valeur de p < 0,001) les solutions numériques de santé (Tab. 1).
À retenir
Les auteurs concluent que les SNS sont largement utilisées dans le parcours du patient atteint de cancer. Cependant, ces outils doivent être conçus et mis en œuvre avec les populations concernées afin de réduire la fracture numérique.
• Patel AM, Bhardwaj A, Basch E et al. Evaluating mass implementation of digital health solutions to improve quality and reduce disparities in a large multisite community oncology practice. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 1507.
PROStep : PRO pour améliorer la communication patient-clinicien ?
Dans cet essai randomisé, les auteurs s’intéressaient à la communication patient-clinicien, les données de PRO n’ont pas permis ici d’améliorer la communication entre patients et cliniciens.
Méthode
Cet essai randomisé a recruté 108 patients atteints de cancers gastro-intestinaux ou pulmonaires incurables traités par chimiothérapie dans un grand centre de santé universitaire américain. Les patients ont été randomisés dans :
• le bras A (bras contrôle),
• le bras B, recueillant les symptômes de manière hebdomadaire par le patient par SMS et par un suivi du nombre de pas (avec un bracelet Fitbit©),
• le bras C qui, en plus du recueil réalisé dans le bras B, invitait les patients à discuter des symptômes et de l’état fonctionnel avant chaque visite.
Le critère principal était la mesure de la perception qu’ont les patients de la compréhension du clinicien de leur état fonctionnel et de leurs symptômes.
Résultats
Respectivement 33, 37 et 38 patients ont été inclus dans les bras A, B et C. Environ 55 % étaient des hommes, l’âge moyen était de 58,9 ans, 77 % avaient un cancer gastro-intestinal et 23 % un cancer du poumon.
À 6 mois, il n’y avait aucune différence entre les bras :
• dans la perception de la compréhension des symptômes (bras A : 4,5 ; bras B/C : 4,5 ; p = 0,85)
• ou de l’état fonctionnel (bras A : 4,5 ; bras B/ C : 4,3 ; p = 0,59). Les patients ont signalé que leur équipe d’oncologie discutait rarement des données PROStep lors des consultations.
• Les taux d’hospitalisation n’étaient pas non plus différents (42 et 45 % pour les bras A et B/C
(p = 0,8)).
À retenir
Les tableaux de bord réalisés par les cliniciens et les patients et fondés sur les données de santé générées par les patients n’ont pas conduit à une meilleure compréhension des symptômes et de l’état fonctionnel par le clinicien.
• Manz C, Ferrell W, Williamson J et al. Remote patient-reported symptoms and passive activity monitoring to improve patient-clinician communication regarding symptoms and functional status: A randomized controlled trial (PROStep). J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 1506.
TOP 2 / Acupuncture
Deux études ont mis en avant l’intérêt de l’acupuncture dans le traitement des toxicités des traitements du cancer : bouffées vasomotrices induites par l’hormonothérapie et xérostomies radioinduites. Une autre étude est en cours au MSKCC dans le traitement des neuropathies périphériques induites par la chimiothérapie (non présentée ici). À noter que cette pratique (l’acupuncture) fait l’objet d’un référentiel AFSOS (1).
Acupuncture et bouffées vasomotrices dans le cancer du sein
Les auteurs se sont intéressés à l’intérêt de l’acupuncture chez les patientes atteintes d’un cancer du sein présentant des bouffées vasomotrices au cours de l’hormonothérapie adjuvante.
Méthode
Des essais randomisés ont été menés sur trois sites (aux États-Unis, en Chine et en Corée du Sud). Les patientes atteintes d’un cancer du sein recevant une hormonothérapie adjuvante avec ≥ 14 bouffées vasomotrices par semaine ont été randomisées :
• dans un bras acupuncture (A)
• ou dans un bras soins usuels (SU) ;
la randomisation avait été stratifiée selon le nombre de bouffées vasomotrices par jour (2-6 ou 7+). Les patientes du bras A ont reçu un traitement par acupuncture standardisé deux fois par semaine pendant 10 semaines (Fig. 2). Les symptômes ont été évalués au départ (baseline) et à la semaine 10.
Figure 2 – Points d’acupuncture.
Le critère d’évaluation principal était la modification de la sous-échelle des symptômes endocriniens (ESS) de l’évaluation fonctionnelle des systèmes endocriniens de traitement du cancer (FACT-ES). Des critères d’évaluation secondaires étaient les modifications du FACT-Breast (FACT-B) et du Daily Hot Flash Score (DHFS).
Résultats
Entre janvier 2019 et juin 2021, 158 patientes ont été randomisées (États-Unis (n = 78), Chine (n = 40) et Corée du Sud (n = 40)). L’âge médian était de 48 ans (valeurs extrêmes : 25-73 ans). À baseline, les patientes ont signalé un nombre quotidien semblable de bouffées vasomotrices moyen de 6,2 ± 4,3 versus 6,5 ± 3,8 respectivement dans le groupe A et le groupe SU.
À la semaine 10, on observait une amélioration statistiquement significative du score ESS, du score total FACT-B et du DHFS dans le bras A versus le bras SU (Tab. 2). La réduction de la DHFS par rapport au départ dans le bras A était de 53 %. Il n’y a pas eu d’événements indésirables graves.
À retenir
L’acupuncture a permis des améliorations statistiquement et cliniquement significatives des bouffées vasomotrices, des symptômes endocriniens et de la qualité de vie spécifiques au cancer du sein chez les femmes en cours d’hormonothérapie adjuvante pour un cancer du sein.
• Lu W, Giobbie-Hurder A, Tanasijevic A et al. Acupuncture for hot flashes in hormone receptor-positive breast cancer, a pooled analysis of individual patient data from randomized trials. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 368.
Acupuncture et xérostomie radio-induite
Les auteurs se sont intéressés ici à l’intérêt de l’acupuncture chez les patients qui ont reçu une radiothérapie pour un cancer ORL qui souffrent de xérostomies radioinduites chroniques.
Méthode
Un essai multicentrique de phase III randomisé et contrôlé a comparé :
• l’acupuncture vraie (AV)
• à un groupe témoin traité par acupuncture fictive (AF)
• et à un autre groupe témoin (GT) sans traitement par acupuncture.
Les patients randomisés avaient été traités pour un cancer ORL par radiothérapie au moins 12 mois avant l’inclusion, ils souffraient d’une xérostomie de grade 2 ou 3 selon l’échelle RTOG modifiée. Ils ont été randomisés dans un des trois groupes. Les patients du groupe AV et AF étaient traités deux fois par semaine pendant 4 semaines (Fig. 3). Puis, ceux qui avaient obtenu une réponse partielle (diminution de 10 à 19 points sur le questionnaire Xerostomia (QX)) ont alors reçu 4 semaines supplémentaires du même traitement. Les patients qui n’étaient pas répondeurs ou en réponse complète n’ont pas reçu de traitement supplémentaire.
Figure 3 – Points d’acupuncture utilisés dans le groupe acupuncture vraie (AV).
Le critère principal était le QX à 4 semaines, des évaluations à 8 et 12 semaines ont été réalisées.
Résultats
Au total, 258 patients ont participé. L’âge moyen était de 65 ans, 78 % étaient des hommes et 67 % avaient une maladie AJCC de stade IV a, b.
À 4 semaines, il existait des différences significatives en faveur du groupe AV (Fig. 4) versus les autres groupes.
Figure 4 – Résultats à 4 semaines du questionnaire xérostomie (QX).
Il existait des différences entre les groupes dans le score de qualité de vie FACT-HN à la semaine 12 (Fig. 5).
Figure 5 – Évolution de la courbe de la qualité de vie mesurée par l’échelle FACTG.
À retenir
Les auteurs concluent à une efficacité de l’acupuncture dans le traitement des xérostomies radioinduites chroniques, elle permet d’améliorer les symptômes et la qualité de vie.
• Cohen L, Danhauer S, Rosenthal DI et al. A phase III, randomized, sham-controlled trial of acupuncture for treatment of radiation-induced xerostomia in patients with head and neck cancer: wake forest NCI community oncology research program research base. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 12004.
• Afsos. Acupuncture et cancer. Référentiels en soins oncologiques de support. 22 mars 2018. Disponible sur : www.afsos.org/wp-content/uploads/2014/12/Acupuncture-et-cancer_AFSOS.pdf
TOP 3 / Toxicités radioinduites
Voici deux méthodes pour prévenir les toxicités radioinduites, la décolonisation bactérienne est une méthode simple et qui semble efficace dans la prévention de la radiodermite aiguë et l’avasopasem manganèse dans la prévention de la mucite orale sévère.
Décolonisation bactérienne et prévention de la radiodermite aiguë
La dermatite radique (DR) secondaire à la radiothérapie (RT) pour traiter le cancer réduit la qualité de vie (QdV) et peut conduire à l’interruption du traitement, son étiologie exacte est par ailleurs inconnue. L’hypothèse bactérienne est étudiée ici.
Méthode
Il s’agissait d’un essai de phase II randomisé comparant la décolonisation bactérienne (DB) aux soins standard (SS). Les patients atteints d’un cancer du sein ou d’un cancer ORL devant recevoir une RT fractionnée (≥ 15 fractions) ont été randomisés :
• dans le bras intervention (pommade intranasale à la mupirocine deux fois par jour et/ou lavage corporel à la chlorhexidine une fois par jour pendant 5 jours consécutifs avant le début de la RT et répétée pendant 5 jours toutes les 2 semaines pendant la RT) ;
• ou dans le bras SS (utilisation d’émollients selon les besoins).
Le critère de jugement principal était le développement d’une DR de grade ≥ 2 en utilisant les critères du NCI-CTCAE v4.03.
Résultats
80 patients ont été randomisés de juin 2019 à août 2021. 78 patients atteints d’un cancer du sein et deux atteints d’un cancer ORL, 76 patients ont été inclus pour l’analyse (38 dans chaque groupe). Les caractéristiques cliniques et démographiques étaient bien équilibrées entre les bras.
Il a été observé une diminution significative des RD de grade ≥ 2 dans le groupe DB : 0/38, 0 versus 9/38, 23,7 % ; p = 0,002 (Fig. 6). Un modèle de régression linéaire a montré une association significative entre la DB et la diminution du grade de RD (estimation = -0,431, IC 95 % : -0,7516, -0,1054 ; p = 0,010) après ajustement pour d’autres facteurs de risque de RD. La plupart des patients n’ont pas signalé de difficulté avec la DB, un seul a arrêté sa DB en raison de démangeaisons.
Figure 6 – Dermatite radique en fonction du groupe.
À retenir
Les auteurs concluent que leurs résultats sont en faveur de l’utilisation d’une DB pour prévenir la desquamation humide chez les patients recevant une RT pour un cancer du sein ou un cancer ORL.
• Kost Y, Mieczkowska K, Deutsch A et al. Bacterial decolonization to prevent acute radiation dermatitis: a randomized trial. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. LBA12003.
Avasopasem manganèse et prévention de la mucite orale sévère
Près de 70 % des patients traités par radiothérapie avec modulation d’intensité (IMRT) associée au cisplatine pour un cancer ORL développent une mucite orale sévère (MOS) (grade 3 ou 4 OMS) avec les conséquences que l’on connaît. L’avasopasem manganèse (AVA) est un mimétique sélectif de la dismutase conçu pour convertir le super-oxyde en peroxyde d’hydrogène, ce qui peut protéger les cellules normales des rayonnements et potentiellement sensibiliser les cellules cancéreuses aux rayonnements.
Méthode
Un essai contrôlé randomisé en double aveugle contre placebo étudiant l’efficacité de l’AVA chez les patients recevant 60-72 Gy d’IMRT (> 50 Gy sur ≥ deux sites de la muqueuse buccale) potentialisés par cisplatine (hebdomadaire ou toutes les 3 semaines) a été mené. Les patients ont été randomisés pour recevoir AVA 90 mg ou PBO en perfusion IV de 60 minutes avant chaque fraction de RT. La mucite orale était évaluée selon l’échelle de l’OMS toutes les 2 semaines.
Le critère d’évaluation principal était l’incidence de la MOS (grade 3 ou 4 de l’OMS). Les critères d’évaluation secondaires comprenaient la durée de la MOS.
Résultats
407 patients (241 AVA/166 PBO) d’âge médian de 61 ans ont été inclus, 86 % étaient des hommes, 82 % avec un cancer de l’oropharynx.
Une réduction statistiquement significative de 16 % de l’incidence des MOS (54 versus 64 % ; p = 0,045) et une réduction de 56 % de la durée des MOS (médiane 8 versus 18 jours ; p = 0,002) a été observée (Fig. 7). L’incidence des grades 4 a été réduite de 27 % (p = 0,052) (Fig. 8). Les fréquences des événements indésirables (tous grades, grade 3+, graves) étaient comparables entre les groupes et attribuables au cisplatine.
Figure 7 – Incidence de la MOS selon les groupes de traitement.
Figure 8 – Durée de la MOS, fréquence des MOS de grades 4 et durée des MOS de grades 4
selon les groupes de traitement (critères de jugement secondaire).
À retenir
L’AVA a montré une réduction significative de l’incidence et de la durée des MOS par rapport au placebo au cours de l’IMRT avec cisplatine dans les cancers ORL.
• Anderson CM, Lee CM, Kelley JR et al. ROMAN: Pahse 3 trial of avasopasem manganese (GC4419) for severe oral mucositis (SOM) in patients receiving chemoradiotherapy (CRT) for locally advanced, nonmetastatic head and neck cancer (LAHNC). J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 6005.
TOP 4 / Fatigue et qualité de vie liée à la santé
Voici trois résumés qui ont attiré notre attention dans le domaine vaste de qualité de vie et fatigue. Le plus surprenant reste les résultats obtenus avec un placebo donné en ouvert, c’est-à-dire que le patient est bien au fait qu’il prend un placebo.
APA et cancer du pancréas
Cette communication française explore le bénéfice de l’activité physique adaptée (APA) sur la qualité de vie liée à la santé (QVLS) chez les patients atteints d’un adénocarcinome canalaire pancréatique avancé (ACPa) traités par chimiothérapie (CT) de manière prospective.
Méthode
Les patients avec ACPa et un ECOG 0-2 ont été randomisés 1:1 pour recevoir :
• les soins usuels (SU),
• ou SU plus APA à domicile pour un programme de 16 semaines.
Le programme APA consistait en des exercices personnalisés en aérobie et de résistance.
L’objectif principal était l’effet sur la QVLS à la semaine 16 (S16) mesuré sur trois dimensions du questionnaire EORTC QLQ-C30 (état de santé global (ESG), fonctionnement physique (FP) et fatigue (FA)).
Résultats
Au total, 313 patients ont été inclus entre 2014 et 2020, l’âge médian était de 64 ans, 55 % étaient des hommes, ils étaient en bon état général (ECOG PS 0-1 : 93 %), ils avaient une maladie métastatique dans 77 % des cas traitée par FOLFIRINOX (78 %) ou par chimiothérapie à base de gemcitabine (13 %). 157 ont été inclus dans le bras SU et 156 dans le bras APA.
Dans la population pour laquelle toutes les données étaient disponibles (baseline et S16 ; n = 172), on notait des différences de QVLS (Fig. 9) pour les trois dimensions étudiées du questionnaire EORTC QLQ-C30 (ESG, FP et FA) ainsi que pour plusieurs autres dimensions de QLVS (Fig. 9). Il n’a pas été mis en évidence de différence en termes de survie globale (Fig. 10) ou de survie sans progression.
Figure 9 – Différences de QVLS et de symptômes entre baseline et S16 en fonction des bras SU et APA.
Figure 10 – Survie globale.
À retenir
L’APA a amélioré plusieurs dimensions de la qualité de vie liée à la santé chez les patients avec un ACPa recevant une CT.
• Neuzillet C, Bouché O, Tournigrand C et al. Adapted physical activity (APA) in patients with advanced pancreatic cancer (APACaP): Results from a national prospective randomized GERCOR trial. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 4007.
Pas d’effet sur la dose intensité de la chimiothérapie d’un programme associant l’activité physique adaptée et des conseils nutritionnels
Les auteurs ont étudié l’effet de l’activité physique adaptée (APA) et du régime alimentaire (RA) sur la dose intensité de la chimiothérapie (DI) chez les patientes atteintes d’un cancer du sein (CS).
Méthode
Les patientes atteintes d’un CS de stade I à III ont été randomisées pour recevoir :
• des soins usuels (SU)
• ou une intervention diététique et APA (RA-APA), en face-à-face ou par téléphone pendant 1 an pour 16 séances.
Résultats
Au total, 173 patientes ont été randomisées (SU : n = 86 et RA-APA : n = 87), elles étaient âgées de 53
± 11 ans, avaient un indice de masse corporelle de 29,7 + 6,8 kg/m2, 51 % avaient un stade I. 27 régimes de chimiothérapie différents ont été prescrits. 94 % des participantes randomisées pour l’intervention ont participé à toutes les séances de conseil.
La dose intensité de la chimiothérapie moyenne était élevée dans les deux groupes, aucune différence n’a été mise en évidence entre les bras (Tab. 3).
À retenir
L’intervention sur l’APA et la nutrition n’a pas permis d’améliorer la dose intensité de chimiothérapie. Cependant, un effet dose-réponse a été observé ainsi qu’un effet sur le comportement des patientes pour une meilleure santé. Les analyses futures examineront les effets de l’intervention sur l’observance de l’hormonothérapie.
• Sanft TB, Harrigan M, Cartmel B et al. Randomized trial of diet and exercise on chemotherapy completion in women with breast cancer: The lifestyle, exercise, and nutrition early after diagnosis (LEANer) study. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 12007.
Efficacité du placebo dans le traitement de la fatigue liée au cancer
Les auteurs ont étudié l’effet du placebo (PCB) donné en ouvert (le patient est bien au fait qu’il prend un PCB) sur la fatigue chez des patients atteints de cancer.
Méthode
Dans cet essai contrôlé randomisé en ouvert, les patients avec une fatigue ≥ 4/10 au score d’Edmonton Symptom Assessment Scale (ESAS) ont été randomisés pour recevoir :
• un comprimé PCB deux fois par jour en ouvert pendant 7 jours
• ou une simple surveillance.
Après la semaine 1, les patients des deux bras ont reçu un PCB pendant 3 semaines. La modification du score de l’échelle FACIT-F entre baseline et le jour 8 était l’objectif principal de l’essai.
Résultats
82/90 (91 %) patients étaient évaluables. L’adhésion au PCB était de 93,6 % (sd : 18,6) et de 88,1% (sd : 20,2) au jour 8 et au jour 29 respectivement dans le bras PCB et de 89,9% (sd : 73) au jour 29 dans le bras surveillance.
Au jour 8, on observait une différence entre les deux groupes : score FACIT-F de 6,6 (sd : 7,6) dans le bras PCB versus 2,1 (sd : 9,4) dans le bras surveillance (p = 0,016). Aux jours 15 et 29, lorsque tous les patients recevaient le PCB, il a été noté une amélioration de la fatigue, mais pas de différence entre les bras. Le score FACT-G, le score FACT-G EWB et le score ESAS ont tous montré une réduction significative de la fatigue dans le bras PCB au jour 8 de l’étude (Tab. 4).
À retenir
Le placebo donné en ouvert a été efficace pour réduire la fatigue et améliorer la qualité de vie des patients.
• Yennu S, Azhar A, Lu Z et al. Open label placebo for the treatment of cancer related fatigue in patients with advanced cancer: a randomized controlled trial. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 12006.
TOP 5 / Toxicité des inhibiteurs de checkpoint
Les inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (ICI) font désormais partie du quotidien de tous les oncologues, voici deux résumés sur ce sujet.
Toxicité cardiaque majeure avec les inhibiteurs de point de contrôle immunitaire
Les toxicités cardiaques majeures (TCM) dues aux ICI sont des événements indésirables peu fréquents qui comprennent un éventail large de toxicités cardiaques. Les auteurs se sont intéressés à ce sujet à l’aide d’une base de données d’événements indésirables américaine.
Méthode
Une analyse rétrospective a été réalisée à l’aide de la base de données de notification des événements indésirables graves du NCI-CTEP pour les essais cliniques expérimentaux parrainés par le NCI entre 6/2015 et 12/2019. Les patients éligibles avaient été traités par un anti-PD-(L)1 seul ou en association avec des thérapies anticancéreuses.
Résultats
Au total, 6 925 patients ont reçu des thérapies à base d’anti-PD-(L)1 ; 48 % (n = 3 354) avaient été traités en monothérapie.
Il a été observé 40 TCM liés aux ICI (0,6 %). La myocardite représentait 45 % (n = 18/40) (Fig. 11). Environ trois quart (n = 31/40) des TCM étaient de grade ≥ 3. Une atteinte multiviscérale (autre que cardiaque) a été observée chez 65 % des patients (n = 26/40). L’incidence des TCM était plus élevée avec les anti-PD-(L)1 + thérapies ciblées versus anti-PD-(L)1 + anti-CTLA-4 (2,1 versus 0,09 % ; p = 0,08). Il y avait une incidence significativement plus élevée de myocardite avec les associations à base d’anti-PD-(L)1 par rapport aux monothérapies d’anti-PD-(L)1 (0,39 % ; n = 13/3341 contre 0,14 % ; n = 5/3566 ; p = 0,04). L’association la plus courante étant anti-PD-1 + anti-CTLA-4 (92 % ;
n = 12/13). Chez les patients atteints de myocardite, des antécédents de myosite étaient présents chez 53 % (n = 8/15). Des décès liés à la myocardite ont été observés chez 22,5 %
(n = 4/18).
Figure 11 – Toxicité cardiaque majeure et inhibiteurs de point de contrôle immunitaire.
À retenir
Les auteurs souhaitent mettre l’accent sur la sensibilisation des patients et des prescripteurs à la compréhension des TCM qui restent rares, mais souvent graves et létales dans 25 % des cas.
• Naqash AR, Moey MYY, Tan XWC et al. Major adverse cardiac events (MACE) with immune checkpoint inhibitor (ICI)-based therapies for cancer: A pooled analysis of investigational clinical trials sponsored by the National Cancer Institute Cancer Therapy Evaluation Program (NCI-CTEP) in the United States and Canada. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 2508.
Détresse psychologique et efficacité des inhibiteurs de points de contrôle immunitaire
Les auteurs se sont intéressés à l’effet de la détresse psychologique sur l’efficacité des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (ICI) dans le cancer du poumon non à petites cellules (CBNPC).
Méthode
Les patients atteints d’un CBNPC de stade IIIB-IV nouvellement diagnostiqué et ayant reçu un ICI en première ligne ont été inclus. L’évaluation de la dépression et des symptômes d’anxiété a été mesurée à l’aide du PHQ-9 et du GAD-7, la qualité de vie par le SF-36. Les hormones de stress, comme le cortisol sérique, l’ACTH, l’épinéphrine plasmatique (Epi) et la noradrénaline (NE), ont été dosées. Le taux de réponse objective (ORR) et la médiane de survie sans progression (PFS) ont été estimés en utilisant les tests du Chi-2 et Kaplan-Meier, et la méthode de Cox.
Résultats
Au total, 77 patients ont été inclus, l’âge moyen était de 60,9 ans, 44 (57,1 %) patients présentaient des symptômes de détresse psychologique. Celle-ci était associée à une qualité de vie plus faible (p < 0,001). La durée médiane de suivi était de 16,2 mois.
Les patients avec des symptômes de détresse psychologique présentaient un ORR significativement inférieur (35,9 versus 63,64 % ; p = 0,033) et une SSP plus courte (médiane 12,63 versus 14,60 mois ; IC 95% : 0,36-1,98 ; p = 0,026) (Fig. 12). De plus, la détresse psychologique était le seul prédicteur indépendant de la SSP (HR : 2,71 ; IC 95 % : 1,06-6,90 ; p = 0,037) en analyse de Cox. Les patients souffrant de détresse psychologique avaient des niveaux plus élevés de cortisol sérique (p = 0,040) et d’épinéphrine plasmatique (p = 0,023). De plus, les concentrations sériques de cortisol (p = 0,043) et d’épinéphrine plasmatique (p = 0,025) étaient associées à une réponse inférieure aux ICI.
Figure 12 – Survie sans progression en fonction de la présence de symptôme de détresse psychologique.
À retenir
Les patients souffrant de détresse psychologique sont associés à une moins bonne qualité de vie et à une efficacité moins bonne des ICI en termes d’ORR et de SSP. Des mécanismes potentiels hormonaux de non réponse aux ICI ont été explorés.
• Wu F, Hu C, Liu W et al. Correlation of chronic stress with quality of life and efficacity of immune checkpoint inhibitors in patients with newly diagnosed stage IIIB-IV NSCLC. J Clin Oncol 2022 ; 40 : abstr. 12001.
L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêt en rapport avec cet article.